Tout à propos de Rajiv Khan

28/12/2021

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Fable

Shere Khan, pitoyable tigre pyrophobe du Livre de la Jungle, mammifère brisé qui inspire plus de mépris de peur.

L'aorte éteinte, carrément rouillée, le myocarde n'a jamais battu pour qui que ce soit et le Tigre s'en réjouit. Pas le temps pour le romantisme, les dîners en tête à tête, les séances de cinéma passée le regard planté dans celui de l'autre, pas l'envie non plus. Le dégoût qui barre son visage dès qu’il croise un de ces couples dégoulinants de miévries et de rêves inatteignables. Il se souvint d’un temps ou un serpent lui avait sifflé qu’il était jaloux de ces gens-là, de ce bonheur qu’il n’aurait jamais. Parce qu’un Tigre, ça se dompte mais ça ne se dresse pas, parce que malgré tout les efforts du monde, un Tigre ça reste un animal sauvage, parce que malgré tout l’amour du monde, il reste ce risque infime que le Tigre pète un plomb et arrache la carotide du naïf dompteur.

Auteur, il narre une vision déformée de la vie des quelques Fables qui ont bien voulu la lui narrer, publie des albums anthologiques tous plus chargés d’hémoglobines les uns que les autres. Les histoires s’enchaînent, toutes dénuées de magies, plus préoccupées par la psychologie des intervenants et par le gore de ses scènes que par les histoires de bonnes fées et de bénédictions. L’envie de mettre en lumière la psyché déformée d’êtres conditionnés pour la survie, l’envie de rendre crédit à ces gens réduits au rôle de méchant, l’envie de montrer que le quotidien d’un superprédateur n’a rien de reluisant, que ce n’est pas parce qu’il a la gueule couverte de sang et les crocs apparents qu’il rêve de goûter la chair d’un nourrisson.